Beaucoup ont critiqué la politique de Donald Trump en matière de cannabis. Or, alors que la campagne électorale bat son plein, le président des États-Unis laisse entendre que la situation serait bien pire dans un pays dirigé par son concurrent, Joe Biden. Quoi qu’il en soit, à l’heure actuelle, aucun des deux candidats ne s’est encore exprimé clairement sur la question d’une éventuelle dépénalisation.
La campagne présidentielle aux États-Unis est entrée dans sa phase finale. Dans quelques mois seulement nous connaitrons le nom de celui qui occupera la Maison Blanche jusqu'en 2024. D'ici novembre, les candidats à la présidence seront amenés à préciser leur positionnement sur les questions politiques, économiques et sociétales sur lesquelles les électeurs appuient leur vote.
Le cannabis occupe une place de choix parmi celles-ci. L'usage médicinal de cette plante est légal dans 33 états dont 11 autorisent aussi son usage récréatif. De plus, selon une enquête d'opinion réalisée en octobre 2019 par la société de conseil Gallup, 66 % des américains seraient en faveur de la légalisation du cannabis.
En d'autres termes, un grand nombre d'électeurs – surtout parmi les jeunes – sont favorables à la légalisation du cannabis. Or, cette substance demeure catégorisée dans le Tableau I de la Loi sur les Substances Contrôlées aux États-Unis (Controlled Substances Act). Elle est donc illégale, considérée comme hautement addictive et aucune utilité médicale ne lui est reconnue.
Nombre d'Américains sont donc favorables au retrait du cannabis de ce tableau et à sa requalification. Et les candidats à la présidentielle ? Qu'en opinent-ils ?
Joe Biden (Parti Démocrate)
Au cours des dernières décennies, l'opinion de l'ex vice-président à propos du cannabis s'est fortement adoucie. Par le passé, Biden fut l'un des principaux promoteurs de la War on Durgs (Guerre contre les Drogues) au tournant des décennies 1980 et 1990, quand le cannabis était considéré comme l'ennemi public nº1. Biden a alors été jusqu'à réclamer la peine de mort à l'encontre des trafiquants de cannabis. Plus tard, lorsqu'il secondait Barack Obama, il a poursuivi son activité anti-drogue avec acharnement et détermination.
Mais, en 2019, quelques signes de relâchement semblaient poindre du côté du candidat démocrate. Le porte-parole de sa campagne, Andrew Bates, affirma en effet alors à CNN que Biden était favorable à la décentralisation, au profit des états, des politiques en matière de cannabis et qu'« il [était] en faveur de la dépénalisation [de cette plante] et de l'effacement automatique des casiers judiciaires des peines pour possession de cannabis ». Ces paroles n'ont cependant jamais été confirmées par Joe Biden lui-même.
Biden pensait sans doute que cette démonstration d'ouverture et de progressisme renforcerait sa position dans la course à la primaire démocrate qui battait alors son plein. Il fut pourtant largement critiqué pour son manque d'ambition. Sans surprise, cette timide progression de sa position d'une prohibition ferme vers une tiède dépénalisation ne lui permettait aucunement de rivaliser avec ses adversaires d'alors, Elizabeth Warren et Bernie Sanders.
Le parcours de Biden et sa timide campagne ne laissent que peu de doutes sur la politique qu'il mènerait en la matière une fois installé dans le Bureau Ovale : il maintiendra vraisemblablement le status quo. Dit autrement, il laissera aux états le droit de légaliser le cannabis et d'en réguler l'industrie, tout en le conservant au sein du Tableau I de la Loi sur les Substances Contrôlées au niveau fédéral.
Donald Trump (Parti Républicain)
Malgré l'affirmation, en 2016, en pleine campagne électorale, qu'il était « à cent pour cent » en faveur de la dépénalisation du cannabis médicinal, Donald Trump a globalement gardé le silence sur ce thème depuis son arrivée à la Maison Blanche. Son opinion personnelle transparait néanmoins dans la nomination au poste de procureur général des États-Unis de Jeff Sessions, l'un des plus fermes opposants au mouvement de dépénalisation du cannabis. Même s'il n'a jamais fermé la porte à une réforme, Trump parait en fait largement satisfait de la situation actuelle donnant aux états le droit de légiférer en la matière.
Ainsi, alors même qu'il centre fortement sa campagne sur la réforme de la justice pénale, Trump ne s'est pas prononcé clairement sur une éventuelle réforme des lois régulant l'usage du cannabis. Il a d'ailleurs brouillé les pistes puisque d'un côté, il a placé au sommet de son administration de farouches opposants à cette plante et, de l'autre, il a soumis un projet de loi encadrant les dépenses du gouvernement fédéral, lequel interdit au Département de la Justice d'utiliser les fonds qui lui sont alloués pour intervenir dans les programmes de cannabis médicinal des états.
Enfin, malgré ses positions de 2016 en faveur du cannabis médicinal, Donald Trump a indubitablement une opinion négative de cette plante. En témoigne notamment un enregistrement secret de 2018 qui n'a filtré que cette année. Dans ce document, on peut entendre le président des États-Unis affirmer que la consommation de cannabis ferait « perdre des points de QI ».
Qui prendra l'initiative ?
La candidature de Joe Biden pourrait fournir à Donald Trump une occasion en or de prendre ce problème à bras-le-corps et d'encaisser les gains politiques qui pourraient en résulter. En effet, Joe Biden est quasiment un octogénaire, tant par son âge que par sa posture et ses opinions sur le cannabis. Il n'y a pas là de quoi enthousiasmer les jeunes électeurs en demande de politiques audacieuses et déterminées en matière de cannabis.
Traditionnellement plus progressiste et moins conservateur que son adversaire, le Parti Démocrate aurait pu récolter les bénéfices politiques de son soutien à une réforme profonde du système et à l'avènement d'un futur post-prohibition. Mais la nomination d'un dinosaure de la Guerre contre les Drogues comme candidat pourrait rebuter des électeurs toujours plus nombreux à voir dans le cannabis un élément déterminant de leur vote. Le Parti Démocrate semble donc avoir perdu une bonne occasion de grappiller des votes à son adversaire.
Reste à voir si, à mesure que la pression augmente sur les candidats, l'un d'eux osera s'emparer de ce thème et – enfin – se positionner clairement du côté de la majorité des Américains.
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